Haïti, terre de richesse culturelle et historique, est actuellement en proie à une crise d’insécurité sans précédent. Alors que la population lutte pour sa sécurité au quotidien, un aspect souvent négligé de cette crise est l’impact dévastateur sur les institutions culturelles, notamment les bibliothèques du pays. Ces sanctuaires du savoir et de la culture, traditionnellement préservés en tant que refuges intellectuels, ne sont malheureusement pas épargnés par les troubles qui secouent la nation.
Les bibliothèques en Haïti ont longtemps été des points d’accès essentiels à l’éducation, à la connaissance et à la préservation de l’histoire nationale. Cependant, avec l’escalade de la violence et de l’instabilité, ces institutions sont devenues des cibles pour les actes de vandalisme, de pillage et même d’incendie criminel. Les collections de livres, les documents historiques et les ressources précieuses sont menacés, mettant en péril le patrimoine culturel et éducatif du pays
Le 3 avril 2024, la Bibliothèque Nationale d’Haïti, la plus grande bibliothèque du pays, a été pillée par des gangs armés. De même, le 1er mars, la bibliothèque du Centre Culturel Araka, une institution culturelle fondée en 1988, a subi le même sort. Le Petit Séminaire Collège Saint-Martial, abritant la plus ancienne bibliothèque de l’île, la Bibliothèque des Spiritains, fondée en 1873, a été attaqué et pillé le 1er avril. Bien que la bibliothèque ait été épargnée, elle reste exposée à des actes de vandalisme. Le 4 mars 2024, la commune de Cabaret a subi les attaques des gangs armés qui ont incendié le commissariat de police. Dans cette vague de terreur, le Centre de Lecture et d’Animation Culturelle (CLAC) de Cabaret a également été attaqué, bien que les dégâts aient été limités.
Une perte à deux têtes
L’impact de la destruction des bibliothèques dépasse largement la simple perte de livres et de documents. Ces lieux étaient des carrefours de rencontres intergénérationnelles, d’apprentissage et de dialogue au sein des communautés. Ils servaient de mémoire, de centres de recherche et de développement personnel pour de nombreux Haïtiens. La privation de l’accès à ces ressources fondamentales entrave considérablement la capacité du pays à progresser sur le plan éducatif et culturel.
« Malheureusement, c’est vrai », confie Dangelo Neard, Directeur Général de la Bibliothèque Nationale d’Haïti, à la diffusion d’une vidéo de l’intérieur de la bibliothèque en proie aux flammes sur les réseaux sociaux. Et de continuer : « La protection des ouvrages est d’une importance capitale pour la BNH. Nous avons des documents de plus de 200 ans ».
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« La nouvelle est tout simplement terrible. Je me demande comment nous avons pu descendre si bas. Les dégâts ne sont pas encore évalués compte tenu de la situation de terreur de la zone, mais la Bibliothèque Nationale d’Haïti reste un patrimoine », témoigne Wadley Zephirin, président du Syndicat des employés de la Bibliothèque Nationale d’Haïti, actuellement transféré au Théâtre National d’Haïti.
Face à cette crise, il est impératif que des mesures soient prises pour protéger et préserver les bibliothèques haïtiennes. Les autorités locales, les organisations internationales et la communauté internationale doivent unir leurs forces pour garantir la sécurité de ces institutions et restaurer leur fonctionnement normal, espère Junie Thomas, responsable des questions d’éducation et de littérature jeunesse au sein de l’Association Vive Haïti Livres.
Plusieurs acteurs culturels, dont Roberto Déjean du Centre Culturel Araka, Wadley Zephirin, Ralph Den Laurent de CinemaNous, pour n’en citer que quelques-uns, croient que des initiatives de sensibilisation, de collecte de fonds et de reconstruction sont également nécessaires pour aider à revitaliser les bibliothèques ou autres structures culturelles endommagées et à renforcer leur résilience face aux menaces futures.
La crise d’insécurité en Haïti représente un défi majeur pour la préservation de la culture et de l’éducation dans le pays.
Francois Nedje Jacques
Féru de la culture et de littératures fantastiques; Pour Nedje le livre est une porte ouverte sur soi et sur le monde avec des couleurs et des zestes d’espoir. Opérateur culturel, il croit fermement qu’un plus large accès à l’information et à la culture contribuera fortement à l’équilibre de notre monde!